Des médicaments révolutionnaires… mais pas pour tout le monde
Depuis l’arrivée du sémaglutide (Ozempic®, Wegovy®) puis du tirzépatide (Mounjaro®), l’espoir d’une perte de poids durable a gagné des millions de personnes. Ces agonistes du GLP-1 (et, pour le tirzépatide, du GIP) réduisent l’appétit, ralentissent la vidange gastrique et renforcent la sensation de satiété. Pourtant, 15 à 20 % des patients ne maigrissent pas du tout – certains prennent même du poids.
Ce constat, confirmé par la littérature clinique et par l’expérience de nombreux praticiens, oblige à interroger les causes de cette résistance.
Pourquoi restez-vous affamé malgré Ozempic® ? Le stress, l’ennemi caché des injections
Chez les personnes qui mangent parce que leur signal « faim / satiété » est déréglé, les agonistes du GLP-1 agissent très bien. Mais lorsque l’alimentation sert à calmer une tension interne – anxiété, fatigue, solitude, culpabilité, colère refoulée – le médicament ne règle pas le vrai problème : la menace ressentie par le cerveau émotionnel.
Certaines caractéristiques personnelles (perfectionnisme, autocritique, évitement des conflits, dépendance au regard d’autrui) rendent même l’individu plus vulnérable à la formation de circuits « manger-pour-soulager ».
Pour aller plus loin, voir l’article Quand le poids devient langage
Le circuit neurologique de l’« hyperphagie neuroplastique »
Structure | Fonction clé | Conséquence en cas de stress émotionnel |
---|---|---|
Insula | Conscience des sensations internes | Confond le malaise émotionnel avec la faim |
Gyrus cingulaire antérieur | Détecte le conflit entre ressenti et « autorisé » | Reste en alerte permanente quand les émotions sont refoulées |
Amygdale | Génère peur et impulsivité | Maintient une anxiété de fond, incitant à manger |
Cortex préfrontal dorsolatéral | Contrôle volontaire | Plus il tente de « tenir », plus le risque de craquer augmente |
Cortex somatosensoriel | Signale la sensation corporelle | Tension ou vide perçus comme un besoin alimentaire |
Au fil du temps, ces circuits s’automatisent : le cerveau associe la prise alimentaire au soulagement. On parle alors d’« hyperphagie neuroplastique » — un comportement appris, non relié aux besoins énergétiques.
Pourquoi les agonistes du GLP-1 échouent-ils ?
Les médicaments ciblent l’hypothalamus, le nerf vague et les centres de satiété ; ils n’influencent ni la peur, ni l’anxiété, ni les émotions refoulées. Si la motivation à manger sert de régulateur psychique, le cerveau contournera le signal de satiété pharmacologique. (Médicaments minceur populaires, effets, prix, risques)
Des pistes thérapeutiques qui rééduquent le cerveau
Le véritable enjeu, lorsqu’Ozempic® ou Mounjaro® ne suffisent plus, est de réinitialiser les circuits cérébraux qui confondent stress et faim, afin que la sensation alimentaire redevienne un simple signal physiologique. Autrement dit, le traitement vise moins à renforcer la volonté qu’à désamorcer les circuits appris de « faim-stress », restaurer l’accès aux émotions refoulées et proposer des stratégies alternatives de régulation. Cette approche globale de la résistance aux agonistes du GLP-1 améliore non seulement l’efficacité des injections, mais renforce aussi la stabilité émotionnelle et métabolique à long terme.
PRT – Pain Reprocessing Therapy
- Initialement conçue pour la douleur chronique, cette méthode montre que le cerveau peut produire des symptômes – y compris l’envie de manger – en l’absence de danger réel.
- En identifiant ces signaux comme « fausses alertes », le patient apprend à répondre par la curiosité plutôt que par la lutte ou la nourriture.
EAET – Emotional Awareness and Expression Therapy
- Vise à restaurer l’accès aux émotions refoulées (colère, honte, tristesse…).
- Il ne s’agit pas seulement d’« en parler », mais de les ressentir et les exprimer en sécurité, pour désamorcer le besoin de compensation alimentaire.
Stratégies complémentaires
- Thérapie cognitivo-comportementale axée sur la régulation émotionnelle
- Mindfulness et auto-compassion
- Activités corporelles (respiration, yoga, danse) qui reconnectent aux sensations sans passer par la nourriture
Conclusion : décoder le véritable message de la faim
« J’ai faim » ne signifie pas toujours « j’ai besoin d’énergie ». Parfois, c’est le langage du cerveau qui murmure : « J’ai mal, je suis débordé, j’ai peur, je me sens seul ». Entendre ce message et changer la réponse – plutôt que de museler l’appétit – ouvre la voie à un véritable changement, avec ou sans médicament.